editos
Leurs virus, nos morts
Le collectif "pièces et main d'oeuvre" de Grenoble, qui analyse radicalement le dysfonctionnement de notre société, vient de faire paraître un article sur son site internet.
http://www.piecesetmaindoeuvre.com/IMG/pdf/leurs_virus_nos_morts.pdf
7 janvier 2015
Bien sûr, il y aura encore ce que vous dénonciez, cette bêtise épaisse, cette ignorance crasse qui fait prendre à certains des baudruches imbéciles, gonflées de suffisance, pour des phares de la pensée, le fanatisme qui répond à l’or des mots par le plomb des cartouches, le suivisme des moutons de Panurge. Il y aura encore, n’en doutons pas, l’aveuglement mortifère, la surdité et le mensonge comme outils de gouvernance, les humiliations subies et le désespoir, graines de violence pour demain, l’asservissement de la nature au profit de quelques-uns et la biodiversité qui s’effiloche, l’apathie des états face à la pollution généralisée et au dérèglement climatique, nos biens communs cotés en bourse et les droits essentiels bafoués. Oui, il y aura tout cela, et pour faire bonne mesure, des manteaux de paroles jetés sur les misères du monde.
Des crayons et des pinceaux, aussi, pour décrire le monde tel qu’il est et le peindre comme il pourrait être. Et vos visages, amis, dans nos mémoires.
Bien sûr, il y a aura encore des matins lumineux et des nuits étoilées, le chant des oiseaux, l’odeur merveilleuse de la terre chaude après une averse et le parfum des fleurs. Il y aura encore des ballades en forêt, des flâneries le long des rivières, des cris d’enfants et leurs jeux et leurs rires, de la musique, des chants, des cuisines embaumées, des soirées interminables avec des engueulades mémorables, des rêves et des fous rires partagés. Oui, il y aura tout cela. Et pour faire bonne mesure, l’espoir insensé d’une fraternité féconde.
Des crayons et des pinceaux, aussi, gros de révolte et d’amour, pour décrire le monde tel qu’il est et le peindre comme il pourrait être.
Et à tout jamais dans nos mémoires, vos visages, amis…
Edito de la Lettre de l'ADENY Janvier 2015
Un dernier verre pour la (fausse) route ?
L’humanité est gravement malade. Les diagnostics qui s’accumulent depuis plus de dix ans ne laissent aucun doute sur l’ensemble des pathologies dont elle est atteinte. Deux raisons majeures à cela, étroitement imbriquées : l’épuisement de la plupart des ressources sur lesquelles repose le modèle économique actuel et le risque d’emballement des phénomènes liés aux perturbations que nous faisons subir à la biosphère. Disons-le tout net, si cet emballement survenait, nous aurions autant de chance d’y faire face que d’arrêter un tsunami avec une boîte de mouchoirs en papier.
On peut citer comme particulièrement pénalisant pour l’avenir de l’humanité : le réchauffement climatique et son cortège de catastrophes « naturelles », l’extinction des espèces, l’épuisement des sols, le manque chronique d’eau douce, l’acidification des océans, la pollution chimique généralisée (eau, sols, atmosphère)…
Bonne nouvelle, cependant : il est encore possible de sauver le malade. En commençant par cesser de laisser dériver les émissions de gaz à effet de serre. En 2009, le projet européen ADAM a estimé le coût du sauvetage climatique à 2,5% du PIB mondial : c’est donné, comparé aux dégâts humains et matériels qui résulteraient de l’absence d’action. Lord Isaac STERN l’assurait déjà en 2006 dans son excellent rapport sur l’état de la planète.
Ce constat devrait faire l’unanimité, quitte ensuite à ce que le débat s’instaure sur le choix des remèdes à appliquer… Or, sans relâche, aidés par les grands médias qui ne résistent jamais au plaisir d’entretenir la controverse, les résultats de recherches les plus incontournables sont décrédibilisés par des imposteurs n’ayant aucune compétence sur les sujets qu’ils attaquent (Cf. Claude Allègre et le changement climatique). À qui profite cette imposture ? Aux partisans du libre marché que le mot « régulation » rend enragés, à ceux que la foi inébranlable dans la science « qui-résout-tous-les-problèmes » aveugle sur les limites physiques de la planète, et surtout aux responsables directs de la surexploitation des ressources, industriels et financiers qui en tirent fortune et pouvoir. Plutôt que d’accepter qu’une taxe suffisante sur les émissions de CO2 puisse réorienter massivement les investissements, ces trois acteurs sont à la manœuvre pour empêcher que les activités économiques soient subordonnées à la survie de l’humanité. Ils entendent profiter sans limites de notre addiction aux énergies fossiles : les plus disponibles se raréfient ? Qu’importe, ils veulent extraire jusqu’à la dernière goutte des réserves les moins accessibles de pétrole et de gaz*, quel qu’en soit le prix écologique, ils veulent reprendre l’exploitation du charbon qu’ils dédaignaient hier, ils parlent avec des trémolos dans la voix des magnifiques perspectives qu’offriraient les hydrates de méthane**!
Nous opposons à cette suicidaire folie extractive l’absolue certitude qu’il est possible, qu’il est indispensable, de faire autrement, par une transition énergétique de grande ampleur capable d’assurer confort et prospérité aux humains d’aujourd’hui, sans oblitérer l’avenir des générations futures.
* Sables bitumineux, pétrole et gaz de schiste, off-shore
** Composés solides, présents dans les régions arctiques (pergélisol) ou dans les fonds océaniques